« Que Myriam sorte du milieu de nous, car les femmes ne sont pas dignes de la vie. »
Jésus dit :
« Voici que je l’attirerai (1) pour la faire mâle,
pour qu’elle aussi devienne (2) un esprit vivant, semblable à vous les mâles.
Car toute femme qui se fera mâle entrera dans le Royaume des cieux. »
(1) attirerai ou guiderai
(2) devienne ou soit
Continuité des logia :
La présence de Myriam aux côtés de Jésus est précédemment attestée au logion 21 quand elle interroge Jésus à propos des disciples.
Au logion 22, Jésus préconise « que l’homme ne soit pas homme et que la femme ne soit pas femme » pour entrer dans le Royaume.
Il semble ici que Simon Pierre n'ait pas compris l'enseignement de Jésus.
Le poids des traditions
Dans la première épître à Timothée, traditionnellement attribuée à Paul, mais qui est peut-être une production de disciples de Paul, nous pouvons lire cet héritage de l'Ancien Testament qui a façonné la mentalité des hommes au sein du judaïsme :
« C'est Adam, en effet, qui fut formé le premier. Eve ensuite.
Et ce n'est pas Adam qui fut séduit mais la femme qui, séduite, tomba en transgression.
Elle sera cependant sauvée par la maternité, en demeurant dans la foi, l'amour et la sanctification, en toute modestie. »
(1 Timothée 2.13-15)
Le salut par la maternité est-il un enseignement de Jésus ?
Non, car le salut est le fruit de la persévérance dans la foi, que l'on soit homme ou femme, ce qui conduit Paul à écrire par ailleurs :
« Il n’y a plus ni Juif ni Grec, il n’y a plus ni esclave ni homme libre, il n’y a plus ni homme ni femme, car vous êtes tous un en Jésus Christ. » (Galates 3.28)
Il est évident que le poids des traditions issues d'anciennes croyances a fortement perturbé les consciences, comme les institutions religieuses.
Mais ni Paul, ni Jésus, ne préconisent une mise à l'écart des femmes.
Paul comme Thomas attestent que l'homme et la femme sont égaux en Jésus Christ.
Entrer dans le Royaume
Au logion 22, l'entrée dans le Royaume est assujettie à certaines conditions dont l'égalité entre hommes et femmes.
Selon ce logion 114, il semble que Simon Pierre ne l'entende pas ainsi, considérant les femmes indignes de la vie, probablement pour être fautives du fait de la séduction initiale.
Jésus va nuancer Son propos pour apaiser Simon Pierre.
Il ne préconise plus que l'homme et la femme soient perçus comme égaux mais que la femme devienne l'égale de l'homme en devenant mâle.
Ainsi le mâle pourrait se satisfaire d'être une valeur de référence puisque la femme doit évoluer.
Mais évoluer vers quoi ?
« Lors de la résurrection, il n'y aura ni époux, ni épouse, car ils seront comme des anges dans le ciel. » (Matthieu 22.30)
La vie éternelle qui suit la résurrection implique des créatures asexuées.
C'est vers cela que les hommes, comme les femmes, sont appelés.
C'est ainsi qu'ils deviendront des « esprits vivants », sans considération pour leur support charnel.
C'est pourquoi, dès à présent, chacun peut se préparer en mettant un terme à toutes formes de dominations ou de discriminations.
Pour conclure
Il est intéressant de relever que ce logion traitant de la position de la femme vient conclure l'Evangile selon Thomas.
La question du salut des femmes dans l'Eglise a connu des rebondissements.
Le concile de Mâcon au VIe a-t-il ou non évoqué cette question ?
Quoi qu'il en soit, cette légende a traversé les siècles, ce qui n'a rien d'étonnant dans un monde où la plupart des cultures et civilisations ont méprisé, voire asservi, les femmes.
Nous voici au XXIe siècle face à ce logion qui pourrait fort bien s'interpréter comme une discrimination de la femme que Jésus veut attirer « pour la faire mâle ».
Comme si l'homme, tel que nous le voyons à l'œuvre, jour après jour, dans toute sa misérable splendeur, était une référence...
