Evangile selon Thomas

Parabole du semeur

Evangile selon Thomas

Logion 9 :

Jésus a dit :

« Voici le semeur qui sortit, remplit sa main, jeta. (1)

Il en tomba sur le chemin : les oiseaux sont venus et les picorèrent. (2)

D’autres tombèrent sur le rocher (3) : elles ne prirent pas racine
en bas dans la terre, ni ne montèrent en épi vers le ciel.

Il en tomba d'autres sur les épines :
elles étouffèrent la semence et le ver les mangea.

D’autres, enfin, sont tombées sur la bonne terre :
elles ont donné un bon fruit vers le ciel.

Il y en eut soixante par mesure et cent-vingt par mesure. »

(1) jeta ou lança

(2) les picorèrent ou les cueillirent

(3) le rocher ou la pierre


Concordances :

« Voici un semeur qui est sorti pour semer. Pendant qu'il semait, des grains tombèrent au bord du chemin et les oiseaux sont venus les dévorer.

D'autres tombèrent sur la pierraille, là où il y avait peu de terre. Ils levèrent aussitôt parce que la terre était peu profonde. Le soleil s'étant levé, ils furent brûlés et, en l'absence de racine, ils séchèrent.

D'autres tombèrent dans les épines, et les épines qui ont monté les ont étouffés.

D'autres tombèrent sur la terre, la bonne, et ont donné du fruit : l'un cent, l'autre soixante, l'autre trente. » (Matthieu 13.3-8)

« Ecoutez ! Voici un semeur qui sortit pour semer. Pendant qu'il semait, il en tomba le long du chemin. Les oiseaux vinrent et mangèrent tout.

Une autre partie tomba sur la pierraille, là où la terre était peu abondante. Elle leva aussitôt car la terre était peu profonde. Mais quand se leva le soleil, elle fut brûlée, et faute de racines, elle déssécha.

Une autre partie tomba dans les épines. Les épines montèrent et l’étouffèrent. Elle ne donna pas de fruit.

Et d'autres tombèrent dans la bonne terre. Ils donnèrent du fruit, en montant et en croissant. Ils rapportèrent l'un trente, l'autre soixante, et un autre cent. » (Marc 4.3-8)

« Le semeur est sorti pour semer sa semence. Pendant qu'il semait, une partie tomba au bord du chemin, fut piétinée, et les oiseaux du ciel l'ont mangée.

Une autre tomba sur la pierre. Elle poussa et sécha en l'absence d'humidité.

Une autre tomba au milieu des épines, et les épines ont poussé et l'ont étouffée.

Une autre tomba dans la terre, la bonne, poussa et donna du fruit au centuple. » (Luc 8.5-8)


Continuité des logia :

L'Evangile selon Thomas nous a déjà fait entrer dans l'espace des paraboles, notamment avec le logion 8.

Ce logion 9 poursuit dans cette voie souvent utilisée par Jésus...


De profondes similitudes

L'analyse des paroles de Jésus restituées par Matthieu, Marc, Luc et Thomas révèle de larges concordances.

=> La première phrase annonce le semeur.

Il s'agit du Seigneur, mais on peut aussi considérer que toute personne qui répand Sa parole devient un semeur.

Les quatre Evangiles ne présentent ici que quelques nuances sur lesquelles il ne semble pas nécessaire de s'attarder.

=> 1. Les premières graines...

Elles tombent sur le chemin : c'est un terrain peu propice.

Luc précise que cette partie de la semence « fut piétinée » (Luc 8.5).

La semence, c'est la Parole du Seigneur qui est donc foulée au pied et picorée par les oiseaux.

Les trois Evangiles synoptiques précisent ensuite que les oiseaux représentent le Mauvais (Matthieu 13.19), Satan (Marc 4.15) ou le Diable (Luc 8.12).

Thomas n'apporte pas d'explication. Il invite ainsi les lecteurs à méditer la Parole pour en extraire leurs propres conclusions.

=> 2. Sur le rocher... la pierre ou la pierraille : le terrain n'est guère meilleur pour recevoir la semence.

La présentation des évangélistes est cette fois plus nuancée.

Luc est très concis : « Elle poussa et sécha en l'absence d'humidité. »

Matthieu et Marc se ressemblent quand ils décrivent une croissance rapide des semences... et un dessèchement tout aussi fulgurant.

Les termes employés par Thomas apportent des informations complémentaires :

« Elles ne prirent pas racine en bas dans la terre, ni ne montèrent en épi vers le ciel. »

L'absence d'enracinement peut signifier que ceux qui ont ainsi reçu la Parole et renoncent rapidement n'ont pas relayé les enseignements (en bas sur la terre), ni établi une relation par l'Esprit Saint (vers le ciel).

=> 3. Sur les épines...

Les épines ont mieux poussé que la semence et les mauvaises herbes l'on étouffée.

Thomas ajoute : « le ver les mangea. »

L'explication donnée par Jésus dans les synoptiques permet de comprendre que ce sont les fruits de la chair qui ont étouffé la semence de la Parole : inquiétude des temps et richesse trompeuse (Matthieu 13.22) ; soucis du moment, richesse trompeuse, et désirs envahissants (Marc 4.19) ; soucis, richesses et plaisirs de la vie (Luc 8.14).

Thomas résume tout ceci en un seul terme, le ver, qui ronge le fruit de l'Esprit pour laisser le champ libre aux fruits de la chair.

=> 4. Sur la bonne terre...

La conclusion est similaire dans les quatre Evangiles : la bonne terre va permettre la fructification.

Thomas insiste : « vers le ciel », attestant ainsi que cette fois la relation s'établit par l'Esprit Saint pour diffuser la Parole reçue.

Faut-il chercher un sens particulier aux mesures qui sont données ?

« Trente, soixante et un autre cent » pour Marc et Matthieu, « au centuple » selon Luc qui ne se disperse pas dans les comptes, « soixante et cent-vingt » chez Thomas ?

Il ne semble pas que ces chiffres aient une valeur symbolique et chaque évangéliste a puisé dans ses souvenirs pour nous fournir ces données.


Une ou des sources communes ?

Marc et Matthieu sont les plus proches quand ils relatent cette parabole de Jésus.

Il est possible que l'un se soit inspiré de l'autre.

Luc est plus synthétique, mais comme il l'indique dans son préambule :

« Beaucoup ont entrepris de mettre en forme un récit des évènements qui se sont déroulés parmi nous. » (Luc 1.1)

Luc a eu recours à de multiples témoignages qu'il s'est efforcé d'assembler. Sa source diffère de celle de Marc et Matthieu, étant bien entendu que l'origine demeure Jésus.

Quant à Thomas, il semble ici plus proche de Marc et Matthieu que de Luc.

Il est acquis que Luc n'est pas un témoin direct de la vie de Jésus du fait qu'il reconnaisse avoir recueilli des témoignages.

Matthieu et Thomas font partie des douze apôtres.

Et Marc, qui n'est pas cité parmi les apôtres, faisait-il partie des autres disciples de Jésus restés fidèles jusqu'au bout ?

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